20120415

La 317e section

J'ai commencé ce post en 2009 je crois et je le termine aujourd'hui. Je venais de terminer le roman/film de Pierre Schoendoerffer "La 317e section" où il est question d'un décrochage de plus 150km à travers la jungle durant la fin de la guerre d'Indochine. 


Ce roman âpre et amer m'avait marqué. J'étais rempli des souvenirs de ce livre nuit et jour. 


C'était l'époque où je faisais encore beaucoup de sport. Des courses principalement, et c'est durant l'une d'elle que j'ai eu une hallucination dont la signification m'échappe encore aujourd'hui mais qui sur le moment m'a laissé perplexe. 


Dans le livre de Schoendoerffer, il est question d'une côte à gravir. D'un monticule qu'il faut conserver à tout prix. Ce qu'une section de soldat s'évertue à faire. Durant l'assaut, des soldats meurent et leur dernières pensées vont pour leurs proches, leur mère. 


J'avais pour l'occasion prévenu ma mère. Je lui avais dit que je ferais cette course, qu'elle pouvait y assister , venir me voir, m'encourager.


Les soldats se sont battus jusqu'au petit matin repoussant les vagues d'assaillants vietnamiens qui déferlaient sur eux. Gravir ces pentes jonchées de cadavres relevait du délire. En haut de la pente ? La mort probablement. 


Je ne savais pas si elle viendrait ou pas. Je me suis posé la question pendant toute la course. En gravissant une côte interminable des bribes du roman me sont revenus en mémoire. La pente, la souffrance, la chaleur - on était en été - m'y contraignais. 


Dans la lumière de la journée qui finissait, les ombres des quelques spectateurs qui bordaient la route semblaient effrayantes comme des ennemis planqués dans l'ombre. 


La fatigue et la chaleur m'ont fait délirer. Probablement. 


A quelques mètres du sommet dans un rayon de soleil couchant, j'ai cru la voir. Elle. Ma mère. Ce fut un moment de bonheur. Elle était là. Elle m'encourageait, me disait de tenir ne fusse que quelques mètres. Elle me disait que le sommet était proche. La lumière m'aveuglait et m'empêchait de distinguer les contours de son visage.


Nombreux sont les soldats qui n'ont pas vu l'aube. Mort d'une rafale de mitrailleuse ou d'une grenade jetée par le viet-cong. Mort les yeux ouverts et le ventre déchiqueté.


Je suis mort de ne pas avoir vu ma mère ce jour là. J'aurais voulut qu'elle me voit là gravir cette courbe beau dans l'effort. Qu'elle soit fier de moi. Mais ce n'était pas elle. Cette constatation m'a fauché comme une rafale de mitrailleuse. J'en ai eu les jambes coupées. Le ventre déchiré.


J'ai terminé la course lamentablement. Je n'étais plus porté. A la fin du livre un des soldats se sacrifie. Il reste à l'arrière pour sauver ses camarades qui sont poursuivis par une section viet. Il tire au FM aussi longtemps qu'il peut. A court de munitions, il prend une grenade et se fait sauter avec : la victoire ou la mort.


Je n'ai pas vaincu mais je ne suis pas mort non plus. Douce ironie de la vie d'un sportif qui aurait voulut voir sa mère.











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