20120528

Un spectre hante le monde : Le Capitalisme

Les critiques ont raison de dire que c'est n'est pas le Cronenberg de Festin Nu ou de Crash mais il n'empêche que Cosmopolis est un film prenant à juste titre. Que les images servent à peine le propos. D'accord. Que les acteurs ne sont pas (tous) au bon niveau. D'accord. Que la fin du monde façon Cronenberg sonne un peu faux. D'accord aussi.  Mais il reste quand même au final un goût  de film qui délivre un message que nous comprenons tous sans problème : le système capitaliste est fini et nous avec si nous ne saisissons pas la perche  ou la balle au rebond.




Cronenberg n'est pas Catherine Bigelow ni Ridley Scott et sa manière de filmer les scènes de violence fait un peu amateur —je m'attendais à mieux venant de lui—mais il reste quand même qu'il règne dans cette limousine une odeur de mort qu'il film très bien. Que le scénario soit "simpliste". Ok, d'accord. Et que la fin soit attendue aussi. Mais finalement...attendons nous autre chose du cinéma que de nous servir ce que nous aimons et attendons ?


Si nous n'aimons pas la fin du film, libre à nous de changer le cours de l'histoire. 


Je ne suis pas communiste pour un sous, plus vraiment anarchiste et j'ai rejoins comme beaucoup de mes camarades le rang de capitaliste bien ventru qui mâche de l'Apple et du Facebook tous les jours. Révolté un jour, tranquillisé aujourd'hui. Endormi et avachi sur ma chaise Hermann Miller, je ne pense plus à violenter le monde qui m'entoure. J'ai relégué aux oubliettes mes envies de faire parler la poudre et rendre aux pauvres ce qu'on leur avait volé.


Cosmopolis est un film bavard. Des images ? Oui, quelques unes. Quelques scènes bien filmées aussi : le coiffeur, l'ouverture, le restaurant avec sa femme. Sinon, tout semble un peu téléphoné. La scène avec Mathieu Amalric est .....mauvaise de chez mauvaise  (bon Dieu arrêtez de prendre Mathieu Amalric pour l'incarnation du bad boy)...et puis Juliette Binoche en curatrice baiseuse de golden boy ...au secours.  


Bon mauvais film comme j'aime les classer ....mais un bon moment de cinéma quand même.


p.s.: Les funérailles du jeune rappeur rappellent évidemment Strange Days

20120527

Le 44ème Rugissant

Certains s'achètent une Harley Davidson, une décapotable ou une Rolex.  D'autres font d'incroyables voyages , sautent en parachute, s'inscrivent dans des clubs de gym. A l'approche de la cinquantaine, les hommes investissent pour ne pas avoir le sentiment de tout perdre. 
  
Sauf que j'ai 44 ans à peine...
Le syndrome serait-il déjà apparent chez moi ?  

Ce petit bijou de Leica semble être un (encore) un caprice enfin un caprice qui me trotte dans la tête depuis 1 an. Et bien voilà, c'est fait : j'ai troqué mon Nikon pour un Leica. Autant dire que j'ai changé de religion...
Pour un non-croyant c'est un vrai paradoxe. 

Me voilà donc léger comme l'air, libre presque comme lorsque j'ai acheté mon premier boîtier Nikon: un D80. Je regrette presque les journées passées à prendre des photos sans trop m'inquiéter d'ISO, d'ouverture ou de profondeur de champ. Tout n'était que photographie...
Ensuite j'ai compliqué l'affaire.

Je comprends ce que voulait dire T. lorsqu'il disait qu'avec ce boîtier je retrouverai mes sensations. C'est vrai..plus de menu hyper compliqué, d'indications trompeuses dans votre viseur...rien plus rien que le cadre et le sujet.

C'est reparti ....comme en 40 ;-)


20120520

Sur la Route

Je sentais à cinquante centimètres au-dessous de moi la route se déployer comme une bannière s'envoler, siffler à des vitesses inouïes.


Je connaissais Jack Kerouac que de nom. Je n'avais rien lu de lui. Je ne savais rien de la Beat Generation, et pourtant elle était tout autour de moi. Je ne connaissais pas Kerouac mais j'en ressentais l'influence partout autour de moi. Dans la musique, dans les styles de vie de mes amis squatters....

J'avais entendu parler de Ginsberg et de Burroughs. J'avais vu "Festin nu" et "Crash". Je commençais à comprendre ce que ça disait. Puis, j'ai lu Kerouac s'en m'en douter :"Big Sur". 

Et si je connais si mal l’œuvre de Kerouac c'est parce qu'au fond ma vie rêvée est la sienne. Combien de fois n'ai-je pas pris la route, la tangente comme ils disent. Tôt. J'ai commencé tôt. Mes petites fugues qui m'emmenaient petit déjà dans les champs qui bordent le nord du village où je vivais avec mes parents. 4 ou 5 kilomètres dans la forêt à s'imaginer qu'on est en pleine expédition dans la jungle de Bornéo.

Plus tard, plus loin jusqu'à Paris en Vespa. 19,20 ans ? Cette petite virée qui a failli mal tourner. Cette nuit, dans ce train, dans une gare de marchandises. Le lendemain Paris....la vitesse sur le périphérique et l'arrivée brutale gare de Lyon. La recherche d'un lieu pour dormir..ma rencontre avec les squatters. Cacahuète et puis cette fille dont je ne me souviens plus le nom.



Je dormais à la belle étoile avec mon sac à la main mon couteau dans la poche. Mes longues ballades dans les rues de Paris. Les soirées passées à deviser sur les mondes lointain. Les journées à ne rien faire. Les embrouilles avec les skins.


Et puis, cette scène irréelle : un après-midi au cinéma avec ma mère. Je me souviens du film : Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sex sans jamais oser le demander.


Le départ enfin. La République Dominicaine. Inquiétant quand on voyage seul. J'avais vaguement une adresse, un point de chute. La fille en question n'était pas là. Elle voyage me dit son père...


Me voilà contraint de loger dans l’hôtel de son père. Ma "fortune" y passera. 

Le jour, je déambule en ville, je vais à la plage.

J'observe cette île qui est la copie de l'île d'où je viens. Les femmes y sont encore plus belles, les hommes plus virils.

C'est un peu le Far West. Les mecs se baladent avec des flingues dans la ceinture. 

La nuit, je sors, me faufile dans les endroits que la morale réprouve. Cet après-midi, où j'ai failli perdre la raison et mon porte-monnaie—de m'être attardé trop longtemps avec des jolies filles dans un bar. Poussé à boire par mes anges-gardiennes je n'ai pas vu le coup venir. Il s'en est fallu de peu pour qu'il me tanne le cuir mais c'était mal me connaître. 


Puis la fin qui vient vite, le manque d'argent, l'ennui. L'échange...

Une chambre d'hôtel contre une chambre chez l'habitant. Le départ en voiture, la traversée dans les quartiers pauvres de la ville. Premier choc. Des haïtiens...la frontière n'est pas loin. 

Le tarif n'est pas le même...mais le service non plus. Mon accompagnateur me dit que la logeuse me fera un prix et comme elle me trouve beau, je pourrais aussi m'occuper d'elle. 

Je prends mon bagage et mes jambes à mon cou.

Aventurier peut-être mais pas trop non plus.

Le retour déjà. Saint-Domingue. Paris. 

Je retrouve mon scooter à la gare de Lyon. Il lui manque une roue. 

L'ironie voudra que je revienne quelques années plus tard dans cette même gare au même endroit. Mon scooter ou ce qui en restait y était encore. Longue réflexion sur les traces que nous laissons sur cette terre. Comme tout finit par mourir , s'effacer et disparaître.

Je suis rentré bien sagement dans mes pénates. L'aventure a du bon surtout quand on rentre chez soi.

Trente jours de pérégrination en attendant d'autres départs...

20120509

La Maman et la Putain


Isabelle était une amie de Nathalie. Le cinéma était le lien entre elles. Je l'ai rencontrée dans un dîner je crois. Elle m'avait dit son nom. Il ne me disait rien. Et pourtant...


Quelques années auparavant, j'avais vu ce film "La Maman et la Putain" de Jean Eustach. Un film génial. Qui dit tout. Enfin qui dit beaucoup. Il y a Jean-Pierre Léaud, Bernadette Lafond...et Isabelle.


Je n'ai pas tout de suite fait le lien. La scène d'ouverture...l'étudiante c'était elle.


Elle était belle Isabelle. Pas très grande. De beaux cheveux, mince et un visage comme planté là...de beaux yeux et une voix un peu aigu. 


Je l'ai connu à l'époque de sa rupture d'avec Oliver Assayas. Olivier, je l'avais vu présenter des films, parler d'Irma Verp, la vampire, et je n'accrochais pas. Comble des coïncidences, c'est à New York que je devais le rencontrer en chair et en os. Grand et prétentieux.


Bref, Isabelle avait le coeur lourd. C'est peut-être pour cette raison qu'elle m'invitait à sortir le soir. 


Je me souviens d'un soir en particulier. Elle m'avait donné rendez-vous chez elle. 20h00. Comme d'habitude, j'arrive en retard. 20h30. Je sonne. Elle ouvre la porte. Un bel appartement. Démesuré ? Non, mais Parisien terriblement Parisien. Isabelle m'indique le salon, me demande de l'attendre car elle n'est pas prête. Elle se maquille, continue de s'apprêter sans égard pour moi. J'entend sa voix. Une injonction. Elle me demande de la rejoindre dans sa chambre. Elle est là penchée devant le miroir. La vision est troublante. Dans mon esprit les images d'Isabelle sur le grand écran d'une salle de cinéma sur-imprimées avec les images d'Isabelle qui se maquille sous mes yeux.  


Le parfum qui flotte dans la chambre me tourne la tête. Isabelle me demande de m'asseoir. Je ne vois que le lit. Je m'exécute. Je me réfugie dans le coin opposé du lit. Elle parle. M'interroge du coin de l'oeil. Elle fait allusion au lit. De la possibilité... et moi, je n'en reviens pas. Je me plie. Me recroqueville dans ma coquille. Qu'une femme fasse main basse sur moi passe encore mais pas elle. Je bifurque, bafouille une excuse et me lève...brisant le charme.


Le dîner fut bref. Je n'allais pas être la proie qu'elle aurait voulu. Moi: intimidé. Elle: lassée. 


La maman...la putain et le bambin. C'était il y a plus de dix ans. Aujourd'hui, les choses seraient différentes. 


Comme le disait mon ami Chabran...la vie est ailleurs ...